Un enfant exploite et loue les terres agricoles de ses parents.
Il ne paie pas les fermages.
Ses parents ne les lui réclament pas.
Au décès des parents, ses frères et sœurs s’estiment lésés, considérant que leur cohéritier a bénéficié d’un avantage indirect de leurs parents.

Peut-on considérer que les fermages impayés constituent une donation rapportable à la succession ?

L’article 843 du Code civil dispose qu’un héritier « doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ». C’est le mécanisme du rapport successoral qui permet de rétablir l’égalité entre les héritiers.

Autrement dit, celui qui a « déjà » reçu par le biais d’une donation, prendra moins que les autres dans le cadre du partage.

Mais pour qu’un héritier soit tenu au rapport, encore faut-il que l’acte soit qualifié de donation. Et la Cour de cassation rappelle depuis plusieurs années que la qualification de donation nécessite de justifier d’un acte d’appauvrissement de celui qui donne, dans l’intention de gratifier son héritier. La preuve de cette intention de gratifier, qu’on appelle « l’intention libérale », est un élément déterminant et souvent le plus difficile à apporter.

Dans un arrêt récent du 21 septembre 2022, la Cour de cassation est venue confirmer que lorsque des parents renoncent à réclamer le paiement de fermages à leur enfant dans une intention libérale, il s’agit d’une donation qui est rapportable à la succession.

Concrètement, dans cette affaire, la fille preneur, qui n’avait pas payé de fermages à sa mère sur une période de 10 ans, devra les rapporter à la succession, permettant ainsi un rééquilibrage au profit de sa sœur.

Élodie SEURAT, avocat à Reims en succesion, héritage
Élodie SEURAT
Avocat associé

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La réserve héréditaire est une part du patrimoine qui est réservée à certains proches et à laquelle le défunt « ne peut pas toucher ».  Par opposition, la « quotité disponible » est la part dont le défunt peut librement disposer par le biais de libéralités (c’est-à-dire par donations et legs).

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Il convient de distinguer les cas où les parents sont vivants ou décédés.

Si les parents sont vivants,
leurs enfants ne sont nullement inquiétés par l’endettement de leurs parents.
Un seul bémol est le cas où l’enfant s’est porté caution des engagements de ses parents ; par exemple il est garant du paiement des loyers de ses parents en cas d’impayés ou d’un contrat de prêt. Cet engagement doit être écrit.