À Sézanne, l'ancienne directrice générale des services profitait d'un logement de fonction illégalement selon la justice
Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne considère dans un jugement rendu le 3 décembre que la mise à disposition d'un logement de fonction à la directrice générale des services de Sézanne était illégale, pendant plusieurs années. Le maire doit convoquer un conseil municipal rapidement.
L'ancienne directrice générale des services de Sézanne a-t-elle profité d'un vieux système qui l'avantageait ? La justice semble répondre par la positive à cette question. Saisi par l'avocat de Vincent Léglantier, conseiller municipal d'opposition de la commune, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, dans son jugement rendu le 3 décembre dernier, annule la décision du maire Sacha Hewak de refuser d'abroger deux précédentes délibérations à ce sujet le 22 juillet 2022.
Ces délibérations, datant de 1999 et 2007, autorisaient la directrice générale des services à vivre dans un logement de fonction et à utiliser une voiture de fonction. Or, la loi relative à la fonction publique territoriale de 1990 n'autorise un logement de fonction par nécessité absolue de service, un véhicule et des frais de représentation qu'aux "DGS d'une commune de plus de 5.000 habitants". Sézanne est passée en dessous de la barre des 5.000 habitants en 2017 selon l'INSEE, avec 4.942 habitants au 1er janvier à l'époque.
Le tribunal demande donc au maire de la commune Sacha Hewak de convoquer un conseil municipal dans les deux mois pour abroger ces deux délibérations, et ne plus permettre l'accès à un logement de fonction au Directeur général des services de la ville. Le nouveau DGS, remplaçant d'Andrée Aubès dont il est question dans cette affaire, partie à la retraite au 1er mai 2024, n'habite pas dans ce logement de fonction selon nos informations.
"Cette DGS ne payait pas de loyer, d'électricité, de gaz, toutes les charges étaient prises par la commune, commente l'avocat de Vincent Léglantier, Maître Steven Calot, qui précise qu'un décret paru en 2012 indique que les charges locatives d'un logement de fonction reviennent désormais aux locataires. Cela signifie que toutes ces charges étaient financées par la commune. La situation a perduré en toute connaissance des choses."
Une facture évaluée à 100.000 euros
Le maire a en effet été prévenu de cette anomalie dès 2020, en conseil municipal, par le conseiller d'opposition Vincent Léglantier : "Des interventions à l'amiable ont été faites, des courriers, poursuit Maître Calot.
Systématiquement, on nous répondait qu'il n'y avait pas de difficultés et que la situation était légale. On a donc demandé au tribunal administratif de se prononcer sur la légalité de ces deux attributions, logement et véhicule. Le maire savait donc qu'il y avait une situation illégale, et il n'a rien fait pour l'arrêter."
Si l'on compte les déplacements avec le véhicule de fonction, les loyers depuis 2017 et les charges depuis 2012, sur une fourchette basse, le montant de la facture s'évalue autour de 100.000 euros selon les calculs de Vincent Léglantier qui pointe également du doigt, par ailleurs, des factures de téléphone et d'internet encore payées par la ville aujourd'hui pour le compte de l'ancienne directrice générale des services.
Des suites pénales ?
Le conseiller municipal d'opposition, déjà impliqué dans une affaire contre le maire en 2023, veut poursuivre son action judiciaire : "J'irai jusqu'au bout pour que les Sézannais n'aient pas à subir ce préjudice financier, dit-il à France Bleu Champagne-Ardenne. Il est normal que les responsables de ces illégalités répondent de leurs actes devant la justice." Le Procureur de la République et la Chambre régionale des comptes sont informés de la situation selon Maître Calot, laissant sous-entendre, peut-être, des suites pénales à cette affaire.
De son côté, le maire de la commune Sacha Hewak, que France Bleu Champagne-Ardenne a contacté, souligne qu'il est "prématuré de faire des commentaires sur ce sujet pour le moment, car les motivations du tribunal (les explications de la décision, ndlr.) ne sont pas encore connues." L'édile, en fonction du contenu de ces motivations, n'écarte pas l'idée de faire appel.
Par Clément Conte.