Le strict délai de notification du licenciement disciplinaire

Publié le
Employeur, soyez vigilant lorsqu’un report de l’entretien intervient afin de vous assurer du respect des délais de notification du licenciement pour motif disciplinaire

Dans un arrêt pédagogique rendu le 28 septembre 2022, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le délai strict s’imposant à l’employeur pour notifier au salarié son licenciement pour motif disciplinaire.

En l’espèce, une salariée exerçant en qualité d’attachée commerciale pour une société située en Guadeloupe était convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé le 21 novembre 2016. Elle ne se présentait pas au rendez-vous et l’employeur la convoquait le 5 décembre à un nouvel entretien fixé au 14 décembre. Elle était licenciée le 22 décembre 2016 pour faute grave. S’estimant victime d’un harcèlement moral et soutenant que la notification de son licenciement était trop tardive, elle saisissait la juridiction prud’homale le 2 mars 2017 aux fins de faire annuler son licenciement et de solliciter le paiement de diverses sommes d’argent.

La question en débat dans la présente affaire était la suivante : le délai d’un mois maximum prévu par l’article L1332-2 du code du travail pour notifier au salarié son licenciement pour motif disciplinaire a-t-il été respecté ? Quelle est l’incidence d’un report d’entretien ?

Dans cet arrêt la Cour de cassation rappelle plusieurs solutions traditionnelles en matière de procédure de licenciement.

  • Tout d’abord la lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée au salarié dans le délai d’un mois à partir de la date de l’entretien préalable
  • Le point de départ de ce délai d’un mois est le jour prévu de l’entretien préalable, et non le lendemain
  • L’absence du salarié à l’entretien préalable n’a pas pour effet de décaler le point départ du délai de notification du licenciement, sauf si le salarié a justifié de son impossibilité de se présenter à l’entretien et que ce dernier a été reporté, à la demande de l’intéressé ou à l’initiative de l’employeur. Dans cette hypothèse, le point de départ du délai de notification est alors fixé à la date du second entretien.
  • Lorsqu’un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l’acte, de l’évènement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. A défaut d’un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.
  • Le non-respect du délai de notification prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, l’entretien préalable avait été fixé initialement au 21 novembre 2016, puis reporté à l’initiative de l’employeur au 14 décembre.

Toutefois, il ne ressortait aucunement des éléments du dossier que l’employeur ait été informé par la salariée de son impossibilité d’assister à l’entretien initial, ni qu’il ait fait droit à une demande de report formulée par cette dernière.

Dès lors, le délai de notification débutait le 21 novembre 2016, date du premier entretien fixé, et expirait le 21 décembre 2016 à minuit.

La notification du licenciement disciplinaire, intervenue le 22 décembre 2016, ne pouvait donc qu’être considérée comme tardive et le licenciement jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’employeur doit donc rester vigilant lorsqu’un report de l’entretien intervient afin de s’assurer du respect des délais de notification du licenciement, ou alors refuser tout report de l’entretien préalable.

Olivier BARNEFF
Avocat associé

Dans la même thématique

Prime et absence au travail : quelles articulations ?

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié, Thème : Droit social des employeurs
L’entreprise connait plusieurs régimes de primes et le salarié s’interroge de l’impact de ses absences sur le montant de celles-ci.

Une rupture conventionnelle peut-elle être valablement conclue en alternative à un licenciement pour motif disciplinaire ?

Le choix laissé par l’employeur entre licenciement pour faute et rupture conventionnelle ne constitue pas en soi une pression pouvant remettre en cause la régularité de la rupture conventionnelle.

La procédure de mise en demeure mise en œuvre par l’employeur qui entend faire valoir la présomption de démission du salarié en cas d’abandon de poste volontaire.

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié, Thème : Droit social des employeurs
Depuis le 23 décembre 2022, l’employeur ne peut désormais plus recourir au licenciement pour faute grave pour licencier un salarié ayant volontairement abandonné son poste. C’est ce qu’à nouvellement instauré le législateur dans une récente Loi du 21 décembre 2022 (Loi n°2022-1598) qui créé, à l’article L. 1237-1-1 du Code du travail, la présomption de démission du salarié en cas d’abandon de poste.

Salarié et infraction au code de la route : qui est responsable ?

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié
Salarié et infractions au Code de la route : qui est responsable ?

Action de requalification des CDD en CDI : les précisions de la Cour de cassation en 2023

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié, Thème : Droit social des employeurs, Thème : Rédaction des contrats de travail et avenants
En 2023, la Chambre sociale de la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser les règles de droit applicables aux contrats à durée déterminée. A défaut, de respect de ces conditions de fond et de forme, la juridiction prud’homale sera habilitée à prononcer la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. 

La dispense de reclassement du salarié inapte strictement encadrée par la loi.

Dans un arrêt rendu le 13 septembre 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la régularité d’un licenciement pour inaptitude sans recherche de reclassement et a réaffirmé avec force les conditions strictes auxquelles devait répondre cette procédure.

Preuve de la faute du salarié : le retour du "client mystère" (Cass.soc. 6 septembre 2023)

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié, Thème : Droit social des employeurs
Dans un arrêt du 6 septembre 2023, la chambre sociale de la Cour de Cassation a jugé que la pratique du "client mystère" pour établir d'éventuelles fautes du salarié est licite mais sous certaines conditions.

Congés payés : à vos compteurs ! Le salarié malade continue d'acquérir des congés payés

Publié le - Thème(s) : Thème : Droit du salarié
Ce n’est pas un revirement, c’est une révolution ! Par une série de 7 arrêts (Cass.soc. 13 septembre 2023 22-17.340 à 22-17.342 ; 22-17.638 ; 22-10.529, 22-11.106 et n°22-10.529), la Cour de cassation vient d’apporter un changement drastique dans l’état de notre droit national en matière de congés payés du salarié.

Antidater la rupture conventionnelle, une fausse bonne idée

Pour accélérer la procédure de rupture conventionnelle du contrat de travail, l’employeur et le salarié peuvent parfois s’entendre pour antidater la signature de la convention. Cette pratique s’avère cependant risquée.

Un salarié déclaré inapte en cours de procédure ne peut être licencié pour un autre motif

Dans un arrêt rendu le 8 février 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation a eu à statuer sur la possibilité de prononcer un licenciement pour faute, ici lourde, à l’encontre d’un salarié déclaré inapte avant son licenciement.