Les indemnités de rupture conventionnelle plus taxées à compter du 1er septembre 2023 (Art.4 Loi 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale)

Qui n’a pas entendu parler de cette réforme des retraites ? L’âge légal, la durée de cotisation, le montant de la pension … et son article 4, celui qui va augmenter le coût pour les employeurs des ruptures conventionnelles.
En effet, cette disposition va aligner le régime social de l’indemnité de rupture conventionnelle sur celui de l’indemnité de mise à la retraite, réduite à l’occasion.
L’idée est d’inciter au maintien dans l’emploi des seniors et de freiner la forte hausse constatée des ruptures conventionnelles dans les 3 années qui précèdent l’âge légal de départ en retraite.
Pas étonnant puisque jusqu’à présent, les indemnités de rupture conventionnelles ne bénéficiaient des exonérations de cotisations sociales à hauteur des seuils prévus pour les autres indemnités de rupture du contrat de travail qu’à la condition que le salarié ne soit pas en âge de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire.
Dans ces conditions, les employeurs avaient intérêt à optimiser leur coût en s’assurant que le salarié (souvent demandeur à la rupture conventionnelle en fin de carrière, ne l’oublions pas) n’était pas éligible à la retraite.
Cette exonération de cotisations sociales s’appliquera désormais quelle que soit la situation du salarié au regard de ses droits à retraite, mais l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle sera soumise à la contribution spécifique actuellement due sur les indemnités de mise à la retraite.
Cette contribution patronale spécifique sera de 30% dans les deux cas (indemnité de mise à la retraite ou indemnité de rupture conventionnelle).
Le II de cet article 4 de la loi prévoit que cette modification de régime ne sera applicable qu’aux indemnités versées à l'occasion des ruptures de contrat de travail intervenant à compter du 1er septembre 2023.
Dès lors :
- Si le salarié n’est pas éligible à une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire
L’indemnité spécifique de rupture conventionnelle sera exemptée de forfait social (actuellement dû à hauteur de 20% de la part de l’indemnité exonérée de cotisations de sécurité sociale), mais supportera la contribution patronale spécifique de 30%.
A condition qu’elle ne dépasse pas 10 plafonds annuels de sécurité sociale, cette indemnité restera exonérée de cotisations de sécurité sociale dans les limites actuelles (à savoir un maximum de 2 plafonds annuels de sécurité sociale et à hauteur du plus élevé des 3 montants suivants : indemnité conventionnelle ou légale de licenciement ou 2 années de salaire brut par référence à l’année civile antérieure ou encore 50% du montant de l’indemnité versée).
Cette indemnité restera également exonérée de CSG et de CRDS à hauteur du plus faible montant entre l’indemnité conventionnelle ou légale de licenciement ou le montant admis pour l’exonération de cotisations sociales (calculé comme indiqué ci-dessus).
Cette indemnité restera aussi exonérée en principe d’impôt sur le revenu dans les mêmes limites que prévues ci-dessus pour les cotisations sociales, à l’exception du maximum, qui est de 6 plafonds annuels de sécurité de sociale (au lieu de 2 pour les cotisations sociales), à condition cette fois que l’indemnité conventionnelle ou légale ne soit pas supérieure.
- Si le salarié est éligible à une pension de retraite d’un régime légalement obigatoire
L’indemnité spécifique de rupture conventionnelle sera désormais exonérée de cotisations de sécurité sociales dans les limites indiquées ci-dessus, mais supportera la contribution patronale spécifique de 30% (contre auparavant environ 45% de part patronale des cotisations et 22% de part salariale).
L’indemnité restera également exonérée de CSG et de CRDS dans la limite ci-dessus.
Même exonérée de cotisations sociales, l’indemnité restera toujours dans ce cas entièrement soumise à l’impôt sur le revenu.
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En clair, le coût baisse un peu pour les ruptures conventionnelles avec les seniors et les départs en retraite et il augmente pour les ruptures conventionnelles conclues avec tous les autres.
Il n’est pas certain que cela endiguera l’exode des seniors, souvent à l’origine des ruptures conventionnelles entre 50 et 60 ans, mais cela lissera leurs départs dans le temps, évitant le pic constaté. Une chose est sûre en revanche, l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle coûtera généralement encore et toujours plus que l’indemnité de licenciement. Le prix de la tranquilité peut-être, à l’heure où les salariés qui veulent bénéficier des allocations de chômage ne peuvent plus abandonner leurs fonctions et, sauf exception, pas démissionner.
Vanessa LEHMANN
Avocat - Associée - Droit du Travail
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